À l’heure où une grande vague de soulèvements dénonce les violences policières, le racisme et l’injustice sociale, suite aux décès de George Floyd, Breonna Taylor, Ahmaud Arbery aux Etats-Unis ou encore d’Adama Traoré en France, les grands acteurs environnementaux s’allient au combat pour lui donner une dimension nouvelle : son lien avec le réchauffement climatique. 350.org, Greenpeace, WWF, le World Resource Institute et Extinction Rébellion démontrent que « Racial Justice is Climate Justice ».

Le lien entre racisme, inégalités sociales et réchauffement climatique intervient à de nombreuses échelles. Le commerce mondial fondé sur la colonisation et l’exploitation des pays du Sud a contribué au réchauffement climatique. Aujourd’hui, ce sont aussi les pays du Sud qui en payent le prix fort, ainsi que les populations pauvres dans les pays les plus riches. Le philosophe Dominique Bourg rappelle souvent la règle des 10/50 : les 10% les plus riches émettent 50% du CO2, les 50% les moins riches n’émettent que 10% du CO2.

Cette interconnexion entre social et environnement est parfaitement intégrée dans la conscience d’une génération croissante d’artistes, dont les meilleurs représentants sont ceux qui agissent concrètement sur le terrain, mêlant les dimensions locales et globales, écologiques et sociales : Yinka Shonibare et sa nouvelle Fondation GAS au Nigeria qui inclut une ferme écologique ; Otobong Nkanga (voir l’interview) et ses projets artistiques multi-parties prenantes Landversation ou Carved to Flow ou encore sa nouvelle fondation au Nigeria ; Barthémély Toguo avec son projet de référence Bandjoun Station au Cameroun ; Serge Attukwei Clottey (voir l’interview) artiste upcycleur des déchets issus du pétrole, fondateur au Ghana du projet social et artistique GoLokal ; ou encore la toute jeune artiste Louisa Marajo et son projet, Homo Sargassum, une approche à la fois sociale et environnementale sur l’enjeu majeur des sargasses, ces algues brunes envahissant les Antilles, avec la Fondation Tout-monde.
Citons aussi Ibrahim Mahama et Romuald Hazoumé, tous deux participants au Conclave organisé sur le thème du réchauffement climatique en 2017 au Grand Palais par Art of Change 21 (éditeur de cette lettre), ou encore l’artiste Emo de Medeiros qui a créé un mot « contexture » pour qualifier cette approche qui hybride différentes techniques et enjeux.

Quel est le point commun entre tous ces artistes ? Bien avant leur lien avec le continent Africain ou les Antilles, c’est leur avant-gardisme : ils définissent l’art du XXIème siècle, un art « glocal », qui se soucie de son impact, intègre les communautés locales, l’éducation, la sécurité alimentaire, et qui valorise le projet au moins autant que l’objet. Leurs actions de terrain sont parfois considérées comme « hors champ ». La fin de cette séparation, qu’ils actent avec générosité et conviction, est notre chance. Ils ouvrent la voie vers un art engagé, en lien avec son époque, et une manière d’être au monde juste et solidaire. 

Copyright: Barthélémy Toguo, Bandjoun Station

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