Urgence de préserver nos biens communs, regard critique porté sur l’histoire et son héritage, scénarii futuristes intégrant l’ensemble du vivant, la scène artistique internationale ouvre autant de portes qu’il est nécessaire pour fonder une nouvelle façon d’habiter la terre et de la partager équitablement entre les humains et non-humains.

Les routes de ce changement culturel se dispersent de la Finlande à la Slovénie, en passant par les États-Unis ou la Jordanie, avant de zoomer sur la France, dans notre prochain numéro.

La mer, un bien commun en émoi

La première biennale d’Helsinki se tiendra à partir du 12 juin sur l’île de Vallisaari, sous le titre « The Same Sea » (La Même Mer). La dimension insulaire y sera explorée comme métaphore d’un monde fragile et questionnera également la mer comme bien commun, autour d’œuvres d’artistes à la fois finlandais et internationaux tels que Janet Cardiff & George Bures Miller, Katharina Grosse, Gustafsson & Haapoja, ou encore Tadashi Kawamata. L’océan Arctique et sa banquise sont le sujet de maintes explorations de l’artiste Julian Charrière, retracées depuis le 2 mai dans son exposition Towards No Earthly Pole au Dallas Museum of Art aux États-Unis. Les mers plus chaudes, mais tout aussi inquiétantes dans leur évolution liée au réchauffement climatique, unissent l’artiste suisse Claudia Comte et ses complices de TBA21. L’artiste s’attache sur la complexité des coraux dans une exposition sculpturale intitulée After Nature depuis le 11 mai au Musée National Thyssen-Bornemisza de Madrid.

L’écologie décoloniale, une nouvelle approche dans l’art

Penser ensemble enjeux décoloniaux et environnementaux est un impératif si l’on veut véritablement intégrer la diversité à la fois biologique et sociale et explorer d’autres récits que ceux de « l’écologie blanche ». L’exposition Postcolonial Ecologies actuellement en cours au Darat al Funun (Fondation Khalid Shoman), en Jordanie, s’intéresse aux pratiques coloniales et à l’impact des économies extractives sur les environnements naturels des peuples autochtones et sur les écosystèmes endémiques. Cette démarche inspirée de Frantz Fanon rassemble des artistes comme Ali Jabri, Ahmad Nawash, Amal Kenawy, Asunción Molinos Gordo, Gouider Triki, Jananne Al-Ani, ou encore Jumana Emil Abboud.

Le questionnement de la culture post-coloniale et de la globalisation inégalitaire se retrouve également dans le travail de Yinka Shonibare CBE, l’un des artistes les plus nécessaires à l’évolution des consciences. Sa nouvelle exposition personnelle End of Empire au Musée de Salzbourg, en Autriche, regroupe une soixantaine d’œuvres parmi lesquelles des sculptures monumentales.

Crédits : Ditto Ditto, Precious Okoyomon, exposition Sun Rise | Sun Set, Schinkel Pavillon, Berlin, Allemagne, 2020 ©Malina Heinemann / Yinka Shonibare CBE, End of Empire, Museum der Moderne, Salzburg, 2021 ©Rainer Iglar

La dernière lauréate du Frieze Artist Award, Precious Okoyomon, s’inscrit dans cette démarche au travers d’un monde naturel perçu en tant qu’objet de colonisation et d’asservissement. Une sélection minutieuse de plantes invasives et endémiques de la région du Colorado envahiront et transformeront le toit-terrasse de l’Aspen Art Museum à partir du 10 juin.

L’imagination, une nécessité pour un futur durable

Allora & Calzadilla, Marcus Coates et Marjetica Potrč comptent parmi les 30 artistes de la Triennale internationale de l’art et de l’environnement EKO8 qui se tient jusqu’au 18 juillet dans l’ancienne usine textile Maribor, à Melje en Slovénie. Sous le titre « A Letter to the Future », elle entend proposer de nouveaux récits à l’heure de la crise climatique, questionner le passé industriel du lieu et apprendre des peuples premiers.

Tirer de la force de l’imagination un nouveau monde possible, tel est le projet de l’exposition Sun Rise | Sun Set, qui mélange les artistes du 19ème à aujourd’hui (Monira Al Qadiri, Max Ernst, Max Hooper Schneider, Pierre Huyghe, Emma Kunz, Neri Oxman, Rachel Rose, Torbjørn Rødland…). À travers des paysages surréalistes et des scénarios futuristes, l’exposition crée l’expérience d’un autre monde plus écologique, un voyage magistral et inspirant, curaté par Nina Pohl et Agnes Gryczkowska, au Schinkel Pavillon, à Berlin jusqu’au 25 juillet 2021.

Alice Audouin et Céline Chiasera

 

Helsinki Biennale, The Same Sea, Vallisaari, Finlande, du 12 juin 2021 au 26 septembre 2021
Concentrations 63: Julian Charrière, Towards No Earthly Pole, Dallas Museum of Art, Etats-Unis, du 2 mai 2021 au 8 août 2021
After Nature, Museo Thyssen-Bornemisza, Madrid, Espagne, du 11 mai 2021 au 22 août 2021
Postcolonial Ecologies, Darat al Funun – Fondation Khalid Shoman, Jordanie, du 9 mars 2021 au 30 septembre 2021
Yinka Shonibare CBE End of Empire, Museum der Moderne, Salzbourg, Allemagne, du 22 mai 2021 au 21 septembre 2021
Precious Okoyomon, Aspen Art Museum, Colorado, Etats-Unis, du 10 juin 2021 au 16 octobre 2021
EKO 8, International Triennial of Art and Environment / A Letter to the Future, Former Maribor Textile Factory, Ulica heroja Šaranoviča, Melje, Slovénie, du 21 mai 2021 au 18 juillet 2021
Sun Rise | Sun Set, Schinkel Pavillon, Berlin, Allemagne, du 27 février 2021 au 25 juillet 2021 

Mai 2021

Crédits : Henri Rousseau, La Belle et la Bête, exposition Sun Rise | Sun Set, , Schinkel Pavillon, Berlin, Allemagne, 2020 ©Andrea Rossetti / Claudia Comte, Underwater Cacti Series, Port Antonio, Jamaïque, 2019 ©F-StopMovies

 

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